Le voile islamique Données traditionnelles
Que dit le Coran ? Y trouve-t-on vraiment un commandement divin faisant obligation aux femmes musulmanes de s'abriter sous un voile ? Il semble qu'une analyse même sommaire des textes peut aider à clarifier les idées. Le voile est une réalité antique dans le bassin méditerranéen et le Moyen-Orient. Des textes babyloniens du 2e millénaire avant Jésus-Christ en font mention. On le portait en Grèce et à Rome où il était la marque et le privilège des dames de condition libre. Il suffit de se référer à l’épître de saint Paul (I corinthiens 11/2-16). Ce n'est une création nouvelle ni du Coran ni de l'Islam. Il semble qu'il existait déjà dans l'Arabie préislamique et qu’il était porté en ville. On trouve, dans le Coran, plusieurs passages sur la tenue des femmes, lorsqu'elles sont en contact avec des hommes étrangers à leur famille ou lorsqu’elles se trouvent à l'extérieur de leurs demeures. Certains versets sont particulièrement significatifs. S’ajoute à ces passages du Coran, un « Hadith », c'est-à-dire une parole personnelle du « prophète » Muhammad psl. Les différentes traductions du Coran sont marquées par l’interprétation que arabes utilisés. Dans le Coran, sourate 24, verset 31 « Dis aux croyantes de baisser leurs regards, d’être chastes, de ne montrer que l’extérieur de leurs atours, de rabattre leurs voiles sur leurs poitrines, de ne montrer leurs atours qu’à leurs époux, ou aux pères de leurs époux, ou à leurs fils, ou aux fils de leurs époux, ou à leurs frères, ou aux fils de leurs frères, ou aux fils de leurs sœurs, ou à leurs servantes, ou à leurs esclaves, ou à leurs serviteurs mâles incapables d’actes sexuels, ou aux garçons impubères. Dis leur encore de ne pas frapper le sol de leurs pieds pour montrer leurs atours cachés. Ô vous les croyants ! Revenez tous à Dieu. Peut-être serez-vous heureux ! » Le mot employé dans ce texte, « KHUMUR » (pluriel de « KHIMAR »), signifie tout ce qui couvre quelque chose ou le cache, plus particulièrement tout ce qui voile les cheveux, la tête, le visage. D'où le sens de fichu ou de foulard utilisé actuellement. Pour l’essentiel, ce passage conseille aux croyantes de "rabattre leurs voiles sur leur poitrine". Ceci afin de se protéger des hommes étrangers à la famille. Il faut se souvenir qu’il s’agit à l’époque d’une société de type patriarcal où la femme est essentiellement destinée à être mère pour assurer la transmission de l'héritage et de la tradition ancestrale. Dans le Coran, sourate 24, verset 60 Dans cette sourate "La Lumière" au verset 60, il est dit qu'une femme ménopausée peut être libérée de l'astreinte du "vêtement protecteur" à condition de rester décente. Ces femmes peuvent « déposer leurs voiles, à condition de ne pas se montrer dans tous leurs atours, mais il est préférable pour elle de s’en abstenir ». Le mot employé utilisé ici est « THIAB » (pluriel de «THUB») qui signifie habit, vêtement de dessus. Il s'agit du vêtement ample qu'on porte lorsqu'on sort de chez soi. Il est intéressant de constater que ce mot signifie également : moeurs, conduite. Dans le Coran, sourate 33, verset 53 Dans ce verset 53 de la sourate 33 « Les Partisans », s'adresse d'abord aux épouses du prophète, mais aussi à toutes les croyantes. «Lorsque vous demandez quelque objet aux épouses du prophète, faites le derrière un voile. Cela est plus pur pour vos cœurs et pour leurs cœurs.» Le terme employé « HIJAB » désigne ici tout tissu que l'on dispose devant quelqu'un ou quelque chose pour le soustraire à la vue, ce peut être une tenture, une portière, un rideau. Ce terme est utilisé actuellement dans certains pays musulmans pour désigner l’étoffe dans laquelle les femmes se drapent pour sortir de chez elles ou simplement pour désigner ce que l’on appelle habituellement en France le «voile islamique» Dans le Coran, sourate 33, verset 59 Ce verset semble concerner l’ensemble des musulmanes. Il semble qu’à l’époque de la naissance de l’Islam, certaines femmes étaient inquiétées dans les rues de Médine par des bédouins mal dégrossis venus du désert. Dans le verset 59 de la sourate 33, Le terme employé désigne un vêtement ample qui descend jusqu’aux pieds. « O Prophète, dis à tes épouses, à tes filles et aux femmes des croyants de se couvrir de leurs voiles : c’est pour elles le meilleur moyen de se faire connaître et de ne pas être offensées. » Le terme employé « JALABIB » signifie un vêtement ample et descendant jusqu’aux pieds. A ces versets coraniques, s’ajoute une parole qu’aurait prononcée Muhammad, un « hadith » considéré comme sûr, c'est-à-dire incontestable, rapporté par Abou Daoud (chapitre 31, hadith 31). « Le prophète a dit : il ne convient pas à une femme pubère de laisser apparaître autre chose que son visage ou ses mains ». Sans traiter directement du voile, plusieurs « hadiths », paroles personnelles de Muhammad, traitent de la pudeur qui est considérée comme un rameau essentiel de la religion. SELON LA CONCEPTION DES TRADITIONALISTES ET DES FONDAMENTALISTES Les musulmanes pubères doivent cacher, en plus du reste du corps, leurs cheveux, leurs oreilles et leur cou à la vision des hommes étrangers à la famille proche. Ils affirment que la seule discussion possible est la question de savoir s’il est obligatoire ou non pour une femme de voiler en plus son visage. Ces musulmans font une lecture littérale des textes coraniques. Ils estiment, comme musulman, devoir être fidèles à la « Loi islamique » (Shari’a), telle qu’elle fut définie au 9e siècle de notre ère. Toute leur interprétation de l’Islam est marquée par cette démarche fondamentaliste. Ils veulent se lier à la lettre du texte et ne tiennent pas compte du contexte historique et culturel dans lequel le Coran est né. Ils craignent une telle approche du Coran par peur de dérives laxistes et d’infidélité à la parole divine. Ces musulmans pensent que l’interprétation des versets coraniques et du hadith cités ci-dessus a fait l’unanimité chez les véritables savants musulmans. On estime que cette unanimité de jugement équivaut au consensus de toute la communauté musulmane. Ce consensus devient alors le signe de la volonté divine. Ils voient donc dans le port du voile une prescription divine valable en tout temps et en tout lieu. Les jeunes femmes non voilées sont alors considérées infidèles à la loi divine. Cette perspective est souvent liée à divers comportements : Opposition aux valeurs de la société française à laquelle on revendique pourtant son appartenance, affirmation que le voile protège de l’indécence et de la dépravation des moeurs occidentales, réprobation de la mixité garçons-filles, refus de participer à certains enseignements comme la biologie, l'éducation sexuelle ou à certaines activités sportives qui obligent à se dévêtir. Des musulmans considèrent même comme dangereux et impurs certains contacts entre hommes et femmes, tel le fait de se serrer la main. Ils suivent en cela l’attitude réservée et distante en pratique dans certains pays de tradition musulmane. SELON LE COURANT MODERNISTE L’attitude est tout autre: « La finalité essentielle de ce verset repose sur un appel à la pudeur et au respect d’autrui. Cet objectif n’implique pas obligatoirement le port du voile. Une attitude convenable, conjuguée à une bonne instruction, suffira pour respecter l’esprit de ce verset ». Ces musulmans estiment qu’il n’est nullement impudique de se dispenser du voile et que le comportement personnel est seul à prendre en compte. C’est la lecture que font majoritairement les musulmans en France. D'après l’un des ulémas, professeur de théologie musulmane à l'université El-Azhar du Caire, seuls les passages du Coran concernant la foi musulmane ont valeur universelle et définitive et sont intouchables. Quant aux questions relatives à la vie pratique, comme celle du vêtement des femmes, elles ne valent que pour une époque et un lieu déterminés, ici le 7e siècle de notre ère, en Arabie. D'aucuns, s'abritant souvent derrière leur ignorance, leur donne une valeur universelle et définitive Un autre commentateur musulman, professeur à l’Université Al-Azhar du Caire s’exprime ainsi : « En fait, dit-il, le texte n'ordonne pas de porter un voile ou un foulard ou un vêtement particulier. Mais il est demandé de revêtir avec décence les habits de l'époque et du lieu où l'on vit. Cela ne signifie pas qu'il faille se vêtir au XXe siècle, en Europe, comme on s'habillait au VIIe siècle, en Arabie. Le foulard n'a jamais été et n'est pas un signe religieux. Des intégristes islamistes veulent en faire un signe de soumission et d'exclusion des femmes de la vie sociale. Mais cette conception est incompatible avec la véritable SOUMISSION A DIEU qu'est L’ISLAM. Il s’agit d’abord d’une soumission intérieure. L'important n'est pas de revêtir tel ou tel vêtement, mais de s'habiller avec décence à la manière des habitants du pays où l'on se trouve et de ne pas se singulariser ». UNE QUESTION CONTROVERSEE Il est manifeste que les motivations pour lesquelles le « voile » est porté sont diverses : Convictions personnelles, souci d’être une musulmane accomplie, recherche de réserve, pressions de membres de la famille ou du milieu de vie, volonté de s’affirmer musulmane dans la société sans références religieuses, désir parfois adolescent de s’opposer.… Il semble aussi que le port du voile soit favorisé par des réflexes de « minoritaires » en société française. Dans les milieux musulmans, les débats sont parfois vifs sur ce sujet. Certains imams ont une prédication très vigoureuse en faveur du port du voile, menaçant du châtiment divin les femmes qui s’en dispenseraient. Mais d’autres ne suivent pas cette perspective. Un mufti, docteur de la loi de l'islam, disait un jour, en termes volontairement provocateurs, à un groupe de jeunes filles musulmanes qui l'interrogeait sur le voile : « Croyez-vous vraiment que Dieu doive s’occuper de chiffons... » Il reste clair que le voile n’est pas d’abord un signe religieux. Il s’agit d’un signe de pudeur et de réserve marqué par les pratiques de sociétés musulmanes. Très souvent, l’ignorance et des maladresses de ceux qui en ont parlé ont contribué pour une part à en faire un signe identitaire et religieux dans la situation française. VISION RELIGIEUSE DE L’HUMANITE PAR LES MUSULMANS D'un point de vue religieux, l'humanité peut se diviser en trois groupes : • le groupe privilégié des croyants de l'islam. Ils appartiennent à la meilleure communauté voulue par Dieu pour l'humanité et à la religion véridique définitivement restaurée dans son intégrité première. • le groupe de ceux que le Coran reconnaît comme "gens du Livre". Ce sont les juifs, les chrétiens, les sabéens et les zoroastriens. Ils ont reçu de Dieu un Livre contenant un fragment de la révélation. A ce titre, ils sont reconnus dans la plupart des pays musulmans. Même s'ils ne bénéficient pas de tous les droits dont peuvent jouir les croyants de l'Islam, ils peuvent vivre librement dans leur société. Autrefois, ils bénéficiaient du statut particulier de "Protégé" (Dhimmi), moyennant le paiement d'un impôt. • le troisième groupe concerne les polythéistes, les incroyants, les athées. Le Coran conseille fortement d'éviter toutes relations avec eux. Il est même prohibé d'épouser des femmes appartenant à ce groupe, à moins qu'elles n'acceptent de devenir musulmanes avant de se marier. VISION GEOGRAPHIQUE TRADITIONNELLE DE L’HUMANITE PAR LES MUSULMANS • Dar-El-Islam (Maison de la Soumission) : les pays où l'islam est la religion officielle. • Dar-El-Harb (Maison de la Guerre) : ceux où l'islam n'est pas implanté. • Dar-Elc Ahd (Maison de la Trêve) : ceux où l'islam existe sans être la religion officielle. REGARD DES MUSULMANS SUR LES AUTRES RELIGIONS Il importe d'abord d'être conscient que tous les musulmans ne portent pas le même regard sur les non musulmans ni sur les croyants des autres religions. On s'efforcera ici, tant que faire se peut, de n'être ni simpliste ni caricatural. Après avoir indiqué quelques tendances, on terminera par la vision des chrétiens que le Coran inspire aux musulmans. Lorsque des musulmans sont en liens avec des non musulmans La vie amène des musulmans à rencontrer des non musulmans du fait du voisinage ou du cadre de travail. Ils ont ainsi la possibilité de mieux se connaître, de s'apprécier et d'arriver ainsi à faire abstraction de préjugés qui handicapent souvent la relation. Le Pr Ali Amjad, philosophe musulman pakistanais pense que rencontrer l'autre en vérité et s'engager avec lui dans une action commune n'est possible que si l'on peut le considérer tel qu'en luimême, en faisant abstraction de ses convictions. L'expérience nous montre que les divergences dogmatiques ou idéologiques ne sont pas des obstacles infranchissables à l'amitié, ni au respect de l'autre. Il arrive souvent que des rencontres se réalisent, que des amitiés naissent, que des échanges s'établissent lorsque des musulmans et des chrétiens se reconnaissent mutuellement comme croyants. La spiritualité dont vivent les uns et les autres, même si elle s'inspire de sources différentes, les aide à approfondir leur relation et à vivre une amitié qui se rejoint en Dieu. Lorsque des musulmans vivent exclusivement dans leur groupe religieux Ils n'entretiennent pas de relations avec un environnement non musulman. On peut rencontrer chez eux, à l'égard des chrétiens ou des juifs, une certaine condescendance due à leur assurance d'être dans la vérité, d'appartenir à la seule vraie religion, celle qui parachève la série des religions révélées. Elle rectifie toutes les erreurs que juifs et chrétiens ont introduites dans leurs écritures : La Torah qui a été donnée à Moïse et l'Evangile qui a été communiqué à Jésus. Ces musulmans éprouvent souvent de la méfiance particulièrement à l'égard des chrétiens. Ils sont sans doute marqués par l'histoire des relations souvent conflictuelles entre l'islam et le monde chrétien, entre l'Orient proche et l'Occident. Ils ont en mémoire ce qu'ils ont appris de l'histoire des croisades. Ils connaissent, et certains ont pu la vivre eux-mêmes, l'humiliation de la colonisation des pays arabo-musulmans et les guerres coloniales qui y ont mis fin. Eux-mêmes et leurs parents ont pu en souffrir. Parfois ils se méfient de l'Occident qu'ils confondent avec la chrétienté. Il arrive qu'ils restent sur leurs gardes vis-à-vis des chrétiens dont ils craignent le prosélytisme. CE QUI EST DIT DES CHRETIENS DANS LE TEXTE CORANIQUE « Ceux qui croient... ceux qui sont chrétiens... voilà ceux qui trouveront leur récompense auprès de leur Seigneur... ils n'éprouveront plus aucune crainte et ne seront pas affligés. » ( Mais qui sont « Ceux qui croient »? Dans le Coran, cette expression peut désigner ceux qui acceptent la foi coranique et la mission de Muhammad psl. Il s’agit probablement de chrétiens qui ont accepté la conversion à l'islam ou, pour le moins, une reconnaissance de l’Islam comme un message de Dieu. Mais les dogmes chrétiens sont fortement contestés par le Coran. Le dogme de la Trinité est rejeté par les musulmans au nom de l’Unicité de Dieu: « Certes ceux qui disent : Dieu est en vérité le troisième de trois», sont impies. Il n'y a de divinité qu'un Dieu unique. S'ils ne renoncent pas à ce qu'ils disent, un terrible châtiment atteindra ceux d'entre eux qui sont incrédules… Le Messie, fils de Marie, n'est qu'un prophète. » (5/72) La notion d’incarnation est impensable pour les musulmans, car il est inconcevable que Dieu se fasse homme. Aussi plusieurs versets dénoncent cette foi des chrétiens. L’un de ces passages est plus particulièrement sévère pour ceux qui affirment que le « Messie est Fils de Dieu » : "Que Dieu les anéantissent, ils sont tellement stupides". (9/30) Un verset du Coran est souvent cité pour manifester l'aptitude au dialogue des musulmans vis-à-vis des chrétiens : « Les chrétiens sont, par l'amitié, ceux qui sont les plus proches des croyants ». La suite du verset permet de préciser: « Tu vois leurs yeux déborder de larmes lorsqu'ils entendent ce qui est révélé au Prophète, à cause de la Vérité qu'ils reconnaissent en lui. Ils disent : Notre-Seigneur, nous croyons. Inscris-nous donc parmi les témoins.» (9/82). En ce qui concerne ce dernier texte, Il s'agit probablement d'un fait historique. Il y a une incertitude par rapport à cet évènement historique précis, mais on ne peut utiliser ce texte pour décrire l'attitude officielle de l’Islam vis-à-vis des chrétiens. Peut-être s’agit-il simplement de chrétiens qui, après avoir rencontré des musulmans ou Muhammad luimême, se seraient convertis à l'islam. Ce texte coranique ferait ainsi allusion à une reconnaissance de l’Islam comme étape ultime de la révélation par des chrétiens. LES RETICENCES DES MUSULMANS VIS-A-VIS DES CHRETIENS • Les chrétiens ont falsifié la révélation qu'ils ont reçue et qui n'est plus conforme ni à l'Evangile que Jésus a reçu ni à la révélation coranique. • Ils refusent la vérité évidente du Coran et la mission donnée par Dieu à Muhammad, alors qu'eux-mêmes, musulmans, reconnaissent la Torah et l'Evangile (ce qui est dit de l’Evangile par le Coran) et tous les prophètes envoyés aux juifs et aux chrétiens, principalement Moïse et Jésus. • Ils donnent des associés au Dieu Unique en croyant en une Trinité que le Coran décrit comme une triade de personnes qui seraient Dieu, Jésus et Marie et qu'ils sont incapables d'expliquer et en reconnaissant Jésus comme Fils de Dieu alors qu'il n'est qu'un homme et un prophète dont la mission principale était d'annoncer la venue d'un autre prophète, Muhammad. • Les chrétiens, avec leur foi trinitaire commettent ainsi le péché d'association, péché irrémissible dont il est dit dans le Coran qu'il exclut du Paradis. Ainsi certains vont jusqu’à considérer le christianisme proche du polythéisme. Mais de nombreux musulmans refusent une telle position. Sur ce sujet les positions exprimées par les musulmans sont divergentes. LA VISION QUE LES MUSULMANS TRADITIONNELS ONT DES CHRETIENS Les musulmans traditionnels ne se fient pas aux expériences positives de rencontres et de collaborations avec des chrétiens. Mais ils s'inspirent de ce que disent, dans ce domaine, le Coran et les commentaires autorisés ou non. Certains versets sont favorables aux chrétiens et il est recommandé de discuter avec eux avec politesse et de la meilleure façon qui soit. Cependant ces musulmans s'inspirent aussi des passages du Coran qui rejettent les dogmes du christianisme et recommandent de se tenir à distance des milieux chrétiens. Les déviations introduites par les chrétiens dans les Ecritures, leur refus de croire au message coranique et l’influence néfaste qu’ils pourraient exercer sur des musulmans en suscitant des doutes sur l’Islam sont les raisons de cette méfiance. Par ailleurs la crainte de ne pas être à la hauteur pour discuter et défendre les positions de l’Islam est aussi une raison de garder des distances. Des courants piétistes musulmans et certaines associations propagent parfois cette attitude. Tendances de l’Islam Évolutions modernes Information 11 L’Islam en France ne représente pas une communauté homogène. Différentes classifications de cette communauté musulmane ont été proposées. Assez souvent, il en a été donné l’analyse suivante : • Les musulmans de milieu populaire marqués par la fidélité aux coutumes acquises dans leur milieu. • Les musulmans modernistes. • Les musulmans laïcisés • Les traditionalistes • Les fondamentalistes et Islamistes (nommés souvent intégristes) • Les mystiques (courant soufi) Mais d’autres distinctions s’imposent : Les Turcs et les Maghrébins, sunnites les uns et les autres, ne sont pas du même rite et ne fréquentent pas les mêmes mosquées. Le courant mystique existe dans toutes les classes de la société, dans les milieux populaires comme dans le monde des cadres et des intellectuels. Il en est de même pour les « islamistes » même si le contenu de leur islamisme n’est pas le même pour tous. Les références nationales et culturelles ainsi que la personnalité de certains imams entraînent des tonalités fort différentes. Il existe également des différences culturelles liées à l’insertion dans la société française. Ainsi des jeunes issus de l’immigration désirent affirmer leur identité et se structurer dans l’Islam, bien qu’ils aient assez habituellement des visions différentes de leurs aînés quant aux obligations religieuses. Mais pour comprendre les divers visages de l’Islam rencontrés en France, il faut remonter le cours de l’Histoire et ceci jusqu’à la naissance de l’Islam. DES ORIGINES A AUJOURD’HUI De 610 à 632, Muhammad psl délivra des messages dont le caractère divin est très vite affirmé dans un monde particulièrement religieux et insatisfait du polythéisme grossier de l’époque. Ces messages recueillis l’un après l’autre formeront le Coran. Mais Muhammadpsl vit avec son peuple. Il s’exprime spontanément, donne des conseils, des réflexions sur les messages coraniques. C’est la tradition du prophète, la Sunna. Durant plus de deux siècles, les musulmans vont s’inspirer du Coran et des la Sunna pour vivre l’Islam. Ils sont appelés à un large effort personnel d’interprétation que l’on nomme « Ijtihâd ». Après la mort de Muhammad psl, sa succession à la tête de la communauté engendra des divisions et des interprétations différentes de l’Islam. Les trois grandes branches musulmanes vont naître à cette époque. Actuellement, elles se répartissent ainsi dans le monde : • Les « Sunnites » (87%), • les « Chi’ites » (12,5%), • les « Kharejites » ou « Ibadites » (0,5%). D’autre part, dès les débuts de l’Islam, un courant mystique développant une riche spiritualité (Soufisme) vit le jour d’abord chez les sunnites. En France, les musulmans, dans leur immense majorité, sont sunnites. Les Chi’ites et les Kharejites sont peu nombreux. La conquête des arabes musulmans va être rapide. Cent ans après la mort de Muhammad psl, en 732, c’est la « bataille » de Poitiers. Au même moment, les musulmans sont déjà sur les rives de l’Indus. Cette expansion prodigieuse eut deux conséquences : • La rencontre avec des peuples différents par leurs mœurs et leur culture posera question aux musulmans : Quelle compatibilité avec l’Islam ? Estil possible de laisser subsister ces cultures sans aliéner les données fondamentales de l’Islam ? Ces cultures représentent -elles un enrichissement réel ? • Une loi générale parut très vite nécessaire pour donner une cohésion à cet immense Empire composite et peu homogène culturellement. Le recours à la loi fondée sur l’islam s’imposa donc. D’ailleurs, dans le contexte de cette époque, cette loi ne pouvait qu’être religieuse. Elle était de nature à donner une cohésion à l’Empire et à permettre à tous les musulmans de se situer en vrai croyant devant Dieu. L’islam apparut comme un don de Dieu pour la réalisation de l’unité voulue par le Créateur. Il s’agissait de définir cette loi Islamique. Les juristes musulmans se livrèrent alors à un vaste travail de réflexion et d’interprétation (Fiqh) essentiellement à partir de deux sources principales : le Coran et la Sunna (Tradition constituée par le recueil de paroles personnelles et de comportements du Prophète Muhammad). Entrent également dans cette élaboration des usages reconnus et le rôle de la raison. Ceci qui donna naissance à la loi islamique (Chari’a) au 9e siècle de notre ère chrétienne. Cette « Chari’a » fut considérée comme la loi divine pour tout musulman. Selon son étymologie, elle est le chemin qui mène à la source d’eau vive apportant aux croyants la paix intérieure et aux communautés une cohésion sociale voulue par Dieu. Elle s’imposa dès lors à tout croyant musulman et ses prescriptions explicites ne purent faire l’objet d’une interprétation personnelle. C’est ce qui fut appelé la « fermeture de la porte de l’Ijtihad ». La mise en œuvre de la « Chari’a » ne s’est pas faite sans oppositions. Il y eut des conflits. « Politiques » « Religieux » s’affrontèrent parfois. Cette loi va dominer l’ensemble du monde musulman jusqu’au 19e siècle, ne laissant qu’une place très réduite à l’interprétation personnelle de l’Islam. UN RENOUVEAU DE L’ISLAM À la fin du 19e siècle, la quasi totalité des pays de tradition musulmane sont sous le joug colonial, scandale pour les musulmans qui ont conscience de former la « Meilleure des communautés ». D’autre part, ces pays musulmans sont pour un bon nombre d’entre eux affrontés à la modernité : Les moyens techniques modernes, les apports scientifiques des européens et les échanges culturels divers vont poser des questions déterminantes au monde musulman. • Comment se fait-il que les musulmans, membres de la « meilleure des communautés » aient autant de retard sur le plan scientifique et technique et qu’ils soient dominés par des non musulmans • Pourquoi ne pas accueillir la science et la technique qui nous vient de l’occident ? Nous, musulmans, sommes capables de nous en servir et de développer un savoir faire déjà avancé chez les occidentaux. • Quels moyens prendre pour changer cette situation ? LES DIVERSES TENDANCES DE L’ISLAM Ces questions et les recherches qu’elles provoquèrent donnèrent naissance, dans les décades suivantes, à des tendances différentes pour l’interprétation de l’Islam. Pour un premier groupe de musulmans, la décadence de l’Islam tient aux musulmans euxmêmes. Ils ont été infidèles par la loi islamique telle qu’elle fut définie par les savants au 9e siècle. Il faut revenir à la « Chari’a » et la communauté musulmane reprendra son essor. En procédant par affirmations radicales, ils vont tomber dans un rigorisme et un fondamentalisme étroit pour bon nombre d’entre eux. Les représentants les plus connus de cette tendance sont, au début du 20e siècle, les « Frères musulmans », parti fondé en 1929 par Hassan El Banna, instituteur égyptien qui définit son mouvement comme : * Une invitation au retour aux sources * Une voie traditionnelle * Une réalité mystique * Une entité politique * Un groupe sportif * Une ligue scientifique et culturelle * Une entreprise économique * une doctrine sociale. La pensée des frères musulmans eut un écho important dans le sous-continent indien avec « Mawdudi » qui propagea une lecture fondamentaliste de l’Islam. Hassan El Banna fut assassiné en 1949. À la suite de ces mouvements, des conceptions de l’Islam marquées par ce défi du radicalisme vont surgir. Ce sont les courants nommés « islamistes ». Il s’agit d’une tendance générale et non d’un parti comme les « Frères Musulmans ». Ils pensent que la chari’a du 9e siècle représente la loi voulue par Dieu et s’imposant à tout musulman. Le courant appelé moderniste qui recouvre plusieurs façons de se situer. Certains sont résolument laïcs, l’Islam représentant un simple mode culturel. D’autres au contraire sont profondément religieux, mais ne veulent pas de la « chari’a » définie au 9e siècle comme référence religieuse. Ce qui compte à leurs yeux, c’est le « Coran et la Sunna du prophète ». La « chari’a » était une élaboration humaine nécessaire à cette époque mais elle est maintenant caduque et Il convient de définir une « chari’a » pour le temps présent. Ils demandent la « Réouverture de la porte de l’ Ijtihad », c'est-à-dire de l’interprétation personnelle très restreinte depuis la définition de la chari’a au 9e siècle. Dans une zone intermédiaire se situent de nombreux musulmans traditionnels. Certains sont davantage marqués par des pratiques et des traditions locales que par une connaissance de la religion musulmane. C’est la fidélité pieuse à la tradition des anciens avec une insistance sur les pratiques et diverses modalités pour l’adaptation du langage religieux à la vie moderne. A ces trois groupes, il faut ajouter la permanence des mouvements mystiques qui existent depuis le début de l’islam. Ce sont des musulmans qui cherchant à vivre toute leur vie dans la présence de Dieu. Ce sont parfois des gens simples ayant une authentique dimension spirituelle. Certains s’enracinent dans la grande tradition mystique de l’Islam. Il existe diverses « confréries » issues de façon plus ou moins lointaine du courant mystique par leur fondateur. Elles existent surtout en Turquie et dans les pays africains subsahariens. Du fait de l’immigration, elles se sont implantées également en Europe. D’autres groupes, à l’origine desquels se trouve une confrérie mystique (En France, le groupe « Foi et Pratique », sont rattachés au mouvement international « Tabligh »). Mais les membres de ces groupes ont pu s’éloigner notablement de la pensée soufie par une lecture fondamentaliste du Coran. Enfin, on trouve des musulmans pour lesquels l’Islam représente avant tout une identité. DES LECTURES MODERNES DU CORAN Jusqu’à une époque récente, l’interprétation de l’Islam jouait essentiellement sur la reconnaissance ou la non-reconnaissance de la Chari’a du 9e siècle en tant que loi divine intangible et sur le droit à une plus large interprétation personnelle. Actuellement des penseurs musulmans vont plus loin en proposant des interprétations nouvelles et audacieuses du Coran lui-même. Ce sont souvent des universitaires reconnus. Mais il faut noter que l’on trouve aussi ces perspectives chez des militants engagés dans des projets sociaux et éducatifs. Pour ceux-ci, cette attitude est plutôt commandée par une intuition liée à l’expérience militante. Dans l’un et l’autre cas, ce sont souvent des prises de position individuelles mais qui commencent à interroger. Pour justifier ces lectures, il y a la référence coranique (Coran 2/255) « Dieu est le Vivant celui qui subsiste par lui-même. Ni l’assoupissement, ni le sommeil n’ont de prises sur Lui ». Ce qui inclut que la Parole de Dieu est vivante et qu’Elle doit s’adresser aux hommes de tous les temps et de toute culture. C’est ainsi que de nouvelles perspectives se font jour pour l’interprétation du texte coranique. Elles sont considérées par leurs auteurs comme parfaitement compatibles avec le caractère sacré du Livre Saint de l’Islam. Il y a dans le Coran des versets considérés comme abrogés, devenus dépassés et désormais caducs par d’autres versets donnant sur le même sujet des enseignements différents. Ainsi un verset déconseille les boissons fermentées. Il est abrogé ultérieurement par un autre verset (verset abrogeant) qui interdit radicalement les boissons fermentées. Dans la conception classique de l’Islam, le verset abrogeant est celui qui intervient chronologiquement après le verset abrogé. Il existe désormais de nouvelles interprétations coraniques situant les choses tout autrement. Les versets abrogés sont des versets concernant une situation particulière de l’époque du prophète. Mais les versets abrogeants sont ceux qui ont une portée générale non circonscrite dans un temps ou un lieu donné. Ce qui suppose un approfondissement important de la science coranique nommée « Science des occasions de la révélation ». Pour certains adeptes de cette conception, les versets de l’époque de Médine, ayant trait à la situation particulière d’un peuple arabe en lutte pour sa survie, sont abrogés par les versets de l’époque mekkoise dont la portée est très générale. Ceci bien que les versets de la période médinoise soient intervenus après les versets de la période mekkoise. Un second aspect de ces lectures nouvelles du Coran est de chercher quelles valeurs profondes les textes coraniques ont proposé à la conscience des hommes, à travers le langage et les coutumes établies de cette époque. Ainsi on perçoit l’appel à la droiture, à la fidélité à sa conscience, au refus du mal dans la communauté… La révélation de Dieu, ce sont ces valeurs que Dieu demande aux hommes de pratiquer dans le contexte culturel et social du temps présent. Il y a donc un décryptage à faire pour discerner ces valeurs et chercher à les exprimer pour les croyants musulmans d’aujourd’hui. Dans cette démarche, le caractère sacré de la langue arabe n’est pas épargné. Dieu l’a employé car c’était la langue de l’époque et du lieu de la révélation. Il y a un autre type de démarche proposée par certains penseurs qui a quelques analogies avec le précédent. Pour la comprendre, le problème du statut de la femme est un exemple particulièrement parlant. Le Coran apporta à l’époque une amélioration très importante à la situation des femmes en général, mais surtout par rapport à celles qui étaient les plus défavorisées. Dans le contexte d’un groupe de culture tribale arabe, le fait d’apporter des règles et dispositions quant au mariage, au respect dû aux épouses, au droit à l’héritage, à l’échelonnement de la répudiation sur plusieurs mois, à la protection d’un membre mâle de la famille pour défendre ses intérêts… cela représentait une avancée par rapport à la situation antérieure. La Parole de Dieu est vivante… le Coran a fait progresser la situation de la femme vers une plus grande reconnaissance sociale et une plus large autonomie. Il faut que ce progrès continue et que la reconnaissance de la place de la femme et de ses droits progresse encore. C’est comme un vecteur dont la direction est déterminée par le Coran. Il existe des variantes de ces diverses manières d’interpréter le Coran. Même si de telles positions sont le fait d’une infime minorité, cette façon de situer les choses s’est développé au cours de ces dernières années. Il est important de ne pas figer une personne dans une seule de ses appartenances. Il arrive ainsi d’identifier spontanément les personnes à leur religion, leur tendance religieuse, leur nationalité. La tentation simplificatrice risque d’engendrer un regard irrespectueux et partial ne permettant pas la rencontre et le dialogue avec les personnes. Tout être humain est à lui seul une véritable histoire. Il est le fruit de multiples facteurs liés à son itinéraire personnel : La famille, les conditionnements déterminants de la petite enfance, le pays d’origine et la culture par laquelle il a été forgé, les rencontres et les évènements de la vie, la profession, le statut social, etc. Le musulman vivant en France Information 12 Lorsqu’il vit en pays à majorité musulmane, le musulman baigne dans l’ambiance des manifestations religieuses quotidiennes de la cité. Ces manifestations soutiennent sa foi et sa pratique : les appels à la prière amplifiés par des haut-parleurs cinq fois par jour, la discipline collective du jeûne du mois de Ramadan, les psalmodies du Coran à la radio et du haut du minaret, les proverbes et les expressions religieuses qui parsèment la conversation et créent ainsi un climat religieux permanent sont autant de références quotidiennes à sa foi musulmane. Le musulman est ainsi porté par une ambiance religieuse et collective. Il se trouve à l'aise chez lui, tant dans sa patrie que dans tout pays musulman, du fait de sa conscience d'appartenir à la 'Umma, cette grande famille qu'il considère comme la "meilleure communauté voulue par Dieu pour l'humanité" (Coran 3,110). VIVRE EN FRANCE Mais lorsqu’il émigre en terre étrangère, cet environnement lui manque et il peut s’en trouver désemparé. Il aura alors tendance à se mettre à l’abri de coutumes qui lui sont inconnues et dont il se méfie. Il craint en effet les influences de tout ce qui est étranger à sa foi, à ses pratiques religieuses et même à des traditions ancestrales qu’il n’a pas nécessairement été habitué à distinguer de sa foi musulmane. En France, les musulmans se trouvent dans un monde de laïcité ou Dieu n’est pas nommé et la religion cantonnée à la sphère privée. Ce type de société est resté largement étranger au monde musulman jusqu’à présent. Même si des musulmans sont originaires d’un pays officiellement laïc comme la Turquie, Il y règne une forte ambiance religieuse qui se manifeste de multiples façons. Certaines familles musulmanes ont parfois des conditions d’existence difficiles du fait du chômage, de l’exclusion ou d’un manque d’adaptation. Ces conditions peuvent être meilleures qu’au pays d’origine, cependant les musulmans ressentent, pour diverses raisons, que leur vie est quelque peu amputée d’une dimension essentielle. Ils éprouvent une absence ou une certaine insignifiance de la présence religieuse dans la société laïque. Ils n’ont plus ces points d’appui d’une société musulmane qu’ils ont été contraints de quitter le plus souvent pour des raisons économiques. Ils ressentent ce monde comme un monde sans Dieu, un monde athée. Ce qui es inconcevable pour un musulman. Les façons de se situer en France, société nonmusulmane, sont très diverses selon les groupes, les personnes et leur itinéraire. Il y a divers types d’intégration et d’acculturation. Les contraintes sociales ont conduit nécessairement les musulmans à une certaine acculturation sur le plan social et relationnel. Au travail, dans les relations humaines et les échanges économiques, il est impossible de se soustraire aux institutions en place, aux usages et aux coutumes d’une société. Mais, comme c’est le cas pour tous les groupes sociaux en situation de minorité, les convictions personnelles, les valeurs reconnues et les données religieuses sont beaucoup moins marquées par l’acculturation. Ce sont des références primordiales par lesquelles la personne s’est structurée et dont elle a besoin pour conduire sa vie. AVEC DES JUIFS ET DES CHRETIENS On ne peut pas ignorer certaines convictions essentielles dans l’Islam, en particulier par rapport aux chrétiens et aux juifs. Elles marquent plus ou moins l’ensemble des musulmans croyants et ne sont pas indépendantes des circonstances dans lesquelles l’Islam est né et s’est développé. Les musulmans ont conscience d’appartenir à la seule vraie religion qui a rétabli dans son intégrité première la Vérité de Dieu, telle qu’elle avait été donnée à Abraham. Ils savent et croient que la Torah a été donnée au prophète Moïse et que l’Evangile a été donnée au prophète Jésus par Dieu. Les musulmans reconnaissent chez les juifs et les chrétiens des «gens du Livre». En recevant la Torah et l’Evangile, ils ont eu accès à une partie de la révélation du Dieu unique. Mais, fidèles à l’enseignement du Coran, les musulmans ont la conviction que les juifs et les chrétiens ont dévié dans l’interprétation des Livres que Dieu leur a transmis et que ces textes ont été déformés et même falsifiés au cours de l’Histoire. La preuve en est que cette Torah dont se recommandent actuellement les juifs et ces Evangiles qu’ont adopté les chrétiens ne sont plus conformes au texte coranique. Le véritable Evangile révélé à Jésus a ainsi été perdu. D’autre part, les chrétiens nient une des missions essentielles de Jésus : l’annonce de la venue de Muhammad, choisi pour recevoir des anges de Dieu le Coran. Le Coran est en effet le « Livre définitif » dans lequel toutes les erreurs introduites par les hommes sont supprimées. Il est le message que les musulmans ont à transmettre à l’humanité entière. Tout homme est appelé à se soumettre à Dieu, autrement dit à être musulman. Aussi les musulmans pensent que les chrétiens et les juifs sont destinés à reconnaître un jour le prophétisme de Mohammed. Pourquoi s’obstinent-ils à refuser ce message coranique qui complète et rectifie la révélation qu’ils ont reçue? Pourquoi ont-ils cette attitude de rejet vis à vis du prophète Muhammad ? Ce refus de voir les signes pourtant évidents, contenus dans le Coran, leur sera sans doute préjudiciable. Pourront-ils être admis à goûter les joies du paradis réservées à ceux qui se seront soumis à Dieu en acceptant la Loi coranique? Selon la tradition musulmane classique, on considère cette non conversion à l’Islam comme un aveuglement ou une méconnaissance de la vérité. Si les hommes ont le cœur disposé à recevoir la vérité et s’ils reçoivent un témoignage authentique sur l’Islam, ils se reconnaîtront naturellement musulmans, ce qui représente l’identité fondamentale de tout être humain. Cependant, sur ce sujet, on rencontre chez les musulmans en France des positions très diverses. En terre traditionnellement musulmane, c’est la société tout entière avec ses institutions politiques et sociales, qui en principe doit être conforme à la « Chari’a » la loi islamique. Les chrétiens et les juifs y sont acceptés et ont le droit d’y avoir leurs institutions et d’y célébrer leur culte. Mais ils sont selon la notion traditionnelle des « Dhimmis », c'està-dire des protégés par la société musulmane. C’est encore la perspective commune de nombreux croyants musulmans par rapport aux « gens du Livre », juifs et chrétiens. En terre non musulmane, les musulmans ne sont donc plus dans une position d’autorité dans la société. Certains pensent cette situation comme transitoire. En ce qui concerne les chrétiens Lorsque des musulmans rencontrent des croyants chrétiens, ils savent que parmi eux se trouvent des gens qui prient et qui se dévouent à faire du bien autour d’eux, comme s’ils étaient de bons musulmans. Des musulmans en France se sont sentis souvent accueillis par des chrétiens et beaucoup ont affirmé le poids de l’Eglise catholique en leur faveur. Des propositions de dialogue faites par des chrétiens, des relations amicales, des relations de voisinage ou de travail, des actions menées en collaboration sur le plan social ou éducatif, ont permis à certains de tisser des liens et de s’apprécier. Des musulmans trouvent chez les chrétiens des croyants à qui ils font volontiers confiance. Cependant si un texte coranique est particulièrement favorable aux chrétiens, il y a aussi une mise en garde par rapport à des amitiés qui risqueraient de détourner de l’islam. Et comment ces chrétiens peuvent-ils croire à des erreurs aussi évidentes que la Trinité (comment Dieu unique peut être trois ?), l’Incarnation (Comment se permettre d’affirmer que Dieu peut engendrer un fils ?) et la Rédemption (Comment croire que les juifs on pu tuer Jésus prophète et protégé par Dieu ?) De plus en affirmant Jésus « Fils » de Dieu, les chrétiens sont parfois considérés comme des « associateurs » (Qui donnent à Dieu des associés, des personnes semblables ou égales à Dieu.) que certains iront jusqu’à assimiler à des polythéistes. En ce qui concerne les juifs En ce qui concerne la rencontre avec les juifs, les réticences peuvent être nombreuses. Le Coran rapporte que les juifs ont persécuté Jésus et ignoré son caractère prophétique. Ils ont voulu le mettre à mort sans y réussir réellement. Ils se sont arrêtés à la Torah dans la connaissance des messages divins. A Médine, lors de la naissance de l’Islam, le conflit des tribus juives avec les musulmans a laissé des traces durables. Les juifs ont refusé de reconnaître le caractère prophétique de Mohammed, n’ont pas voulu se convertir et furent accusés de trahisons lorsque le conflit armé se déclancha avec les païens de la Mekke. Ce conflit originel marque plus ou moins consciemment le regard porté sur le monde juif. S’y ajoute la situation présente au Moyen-orient. Les exactions commises par l’état d’Israël vis-à-vis des Palestiniens majoritairement musulmans ainsi que les justifications religieuses données par des groupes juifs pour s’approprier l’ensemble de la Palestine provoquent de nombreuses réticences et des suspicions par rapport aux juifs. C’est le cas en particulier chez certains jeunes musulmans que la précarité et l’avenir incertain rendent particulièrement sensibles à la situation des Palestiniens. Toutefois des musulmans reconnaissent très volontiers les grandes qualités de certains juifs rencontrés et tout particulièrement de ceux qui n’épousent pas les thèses sionistes. Les musulmans originaires du Maghreb ont de nombreuses
dimensions culturelles communes avec les juifs originaires de ce pays.
source: musulmans en école catholique